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randonnées

20 mai 2013

St Jean Pied de Port / Burgos

Dix jours de randonnées sur le chemin de Compostelle : compte rendu. 

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Je suis marcheur depuis plus de dix ans et je voyais d’un bon œil le fait de faire un jour une longue randonnée,  le chemin de Compostelle était une bonne occasion,  je décidais d’effectuer la partie Espagnole, départ St Jean-pied-de port arrivée St Jacques de Compostelle.

Je n’avais donc pas d’autres  motivations que  celle de marcher et  faisais confiance au chemin pour m’interpeller le cas échéant.

Cette partie se réalise en une trentaine d’étapes pour un total de  plus de 700 kilomètres.

 Partir plus d’un mois ne me réjouissait pas trop et j’avais décidé de m’arrêter à Burgos soit douze étapes pour  trois cents kilomètres.

J’étais bien préparé physiquement, cardio- training, salle de musculation, marche dans les Vosges, je n’avais pas à me soucier de ma condition physique et pourtant je n’étais pas tout à fait rassuré, en effet,  je redoutais déjà la première étape St Jean-Pied-de-Port/ Roncevaux  et ses 1300 mètres de dénivelé pour 27 kilomètres, il existe une étape intermédiaire, le refuge d’Orisson, mais il n’est qu’ à six kilomètres de St Jean ce qui représente une trop petite étape.

Redouter n’est pas dans l’esprit du chemin, à mon rythme j’ai fait cette étape facilement ce qui m’a donné confiance pour la suite.

Cette montée dans les Pyrénées était la plus belle étape de mon périple, j’ai eu la chance d’avoir du beau temps, ce qui ne fut pas le cas pour d’autres, car le col fut fermé le lendemain pour cause de tempête de neige (nous étions le vingt-cinq avril), ce qui ne fut pas le cas non plus pour le reste de la randonnée : pluie, froid, vent m’ont accompagnés pratiquement jusqu'à l’arrivée.

Passons aux problèmes de logistique, en deux mots : le sac à dos, bien entendu je consulte les sites internet qui sont foison, « ne pas dépasser 20 % de son poids 10 % serait raisonnable », donc 95 kilos ca doit donner en toute logique 9,5 kilos : difficile à faire, j’avais 12 kilos eau comprise ce qui semble être  le poids moyen des sacs sur le chemin.

Pendant la marche on ne pense pas au sac, il faut seulement savoir l’ajuster, bien le serrer  sur les hanches pour qu’il ne repose pas sur les épaules, au départ le matin il arrive même de le trouver  étonnamment léger.

Les rencontres sont un bonus, pendant la marche  à condition d’avoir pratiquement la même cadence on se souhaite’ buen camino ‘ et l’on en profite pour discuter. Le soir dans les auberges de pèlerins les repas sont  pris ensemble, le dialogue s’instaure facilement.

Le chemin est un retour aux sources, nous évitons de parler de nous, les niveaux sociaux sont nivelés, cette approche est intéressante car, le passé ne pèse pas sur l’authenticité d’une rencontre, le tutoiement est de règle et c’est bien ainsi.

 L’Anglais est bien utile car beaucoup de nationalités sont représentées sur cette partie Espagnole, les Français étaient loin d’être majoritaire.

Parlons cadence, un marcheur moyen sur cette portion marche a quatre km/h, je me suis rendu compte que je marchais à six à l’heure voir plus, c’est rapide, je passe ma journée à doubler des files de pèlerins de ce fait j’ai déjà exclu les étapes de  vingt kilomètres pour passer a des étapes de plus de trente voir quarante kilomètres, finir l’étape à onze heures et attendre treize heures l’ouverture des auberges n’était pas envisageable.

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Est-ce bien dans l’esprit du chemin cette course, je me suis posé la question durant  les premières étapes, essayant de ralentir, ce qui ne mène à rien car on retrouve rapidement sa cadence, je me suis vite déculpabilisé en rencontrant d’autres marcheurs rapides qui m’ont convaincu qu’il était inutile voir fatiguant de ne pas marcher à son rythme, la seule valeur à suivre étant l’absence d’esprit de compétition, ce ne fut pas toujours mon cas.

Une étape particulièrement difficile avec Pierre, marathonien  venu de Paris a pieds, ayant déjà au moins mille cinq cents kilomètres dans les jambes. Trent-huit kilomètres  à 6,2 de moyenne, Pierre m’a lâché à quatre kilomètres de l’arrivée nous avions changé de revêtement, terre battue puis goudron, sur le goudron j’avais la plante des pieds en feu, Pierre me motivait : «  le mental Serge: si le mental est là le physique suivra », Pierre était un compétiteur et il faisait la course d’étape en étape. Avec le recul, je suis certain que dans cas contraire je n’aurais pas lâché Pierre mais, serais resté avec lui jusqu’à l’arrivée.

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 Une autre rencontre marquante, un couple de Vosgiens soixante-huit et soixante-neuf ans, depuis deux mille,  huitième chemin de Compostelle, seulement vingt-deux étapes au lieu de trente ce qui implique quarante a cinquante kilomètres  jour, marcheurs réguliers, deux bâtons et toujours le même rythme que ca monte, que ca descende, chapeau.

Trois irlandaises de charme, une fait le chemin en courant les deux autres s’occupent de l’intendance (portage de son sac), si le temps ne  permet pas de courir elles marchent ensemble.

Deux gendarmes italiens, ralentis par des ampoules mais courageux malgré les problèmes, (garde du corps a la présidence Italienne, ils  étaient sportifs) j’ai diné avec eux sur trois étapes, la convivialité était de mise, la région que nous traversions  le Rioja était doublement arrosée, dans la journée par la pluie et soir à  l’auberge d’une autre façon, j’en garderais un très bon souvenir.

Un chien sur le chemin avec deux sacoches, il porte son eau et ses croquettes : normal non !

Les auberges de pèlerin : seule la « credenciale », passeport du pèlerin, donne le droit d’accès aux auberges, elle s’obtient auprès des associations Jacquaires et consiste en un petit carnet que l’on fait tamponner aux étapes, il  permettra à l’arrivée d’obtenir  la Compostella, le diplôme du pèlerin.

L’intérêt des ‘albergues’ reste  le prix entre sept et dix € la nuit avec un petit-déjeuner pour 3€ et le repas pèlerins aux environ de dix €, l’inconvénient c’est la proximité, nous sommes le plus souvent dans des dortoirs  ou les boules quies sont hautement recommandées, pour moi l’auberge fait partie intégrante du chemin, les rencontres  se font là, les moments de convivialité n’existent pas dans les hôtels.

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 A l’arrivée La première préoccupation est de trouver  une auberge, une fois son lit désigné le pèlerin prend sa douche, soigne ses pieds et va se coucher une heure ou deux avant de s’occuper du lavage des vêtements (on trouve facilement des machines à laver et à sécher le linge dans les auberges), puis il attend l’heure du repas en général  vers dix-neuf heures, la soirée se terminera  tôt, pour ma part à neuf heures je dormais déjà.

Les pieds, point sensible, les ampoules peuvent vous gâcher la vie, j’avais dans mon sac une bonne quantité de ‘compeed’ que je n’ai pas utilisé, car je n’ai pas d’ampoule par contre la crème NOK est bien utile pour calmer l’échauffement, chaussures retirés, la marche devient boitant, à cause de la plante des pieds qui vous brule, dans le dortoir on dirait une bande d’éclopés, une bonne nuit permet de remettre tout cela en place.

Le chemin est extrêmement organisé, parfois on marche sur des boulevards payés par la commission Européenne, vous pouvez faire porter votre sac d’étape en étape, vous pouvez prendre des taxis, des cars par mauvais temps, on n’est pas vraiment livré à soi-même.

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La communication internet est aussi assurée dans les auberges ainsi que le WIFI gratuit, ils mettent a disposition des ordinateurs payants, deux € pour vingt minutes, pas de soucis non plus de ce coté-là.

Se perdre est pratiquement impossible plusieurs signes à chaque bifurcation du chemin, en ville existe parfois des plaques  encastrées dans le trottoir et cela tout les cinq mètres, il faut vraiment penser à autre chose pour se tromper et si c’est le cas les pèlerins ou les Espagnols sauront vous remettre sur le bon chemin, car on n’est  jamais seul. Pour les amateurs de  solitude il faut faire comme Jean-Christophe Ruffin, prendre le Norte, chemin qui part de Hendaye et qui suit la cote Espagnole, il n’est pas aussi fréquenté que le  ‘ Camino Frances’ pas aussi riche en équipements, et sans doute plus authentique.

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Ce que je recherchais sur ce chemin ? Il est vrai que pour randonner il y a d’autres choix possibles, le GR20, le tour du Mt Blanc et j’en passe, pourquoi le chemin de Compostelle ? Ca cache quelque chose, il faut surement  aller jusqu’au bout pour découvrir ce qui s’y cache, aller au bout de soi, au bout de la fatigue, je ne peux pas encore faire  mienne cette parole de pèlerin :                                                                                                     

‘Je ne cherchais rien sur le chemin et je l’ai trouvé’.

Pourtant le besoin  des pèlerins est bien palpable :

Le poème de Pierre Béarn ci-dessous (1951), démontrait déjà que nos sociétés allaient être en mal de spiritualité

 « Au déboulé garçon pointe ton numéro
Pour gagner ainsi le salaire
D'un morne jour utilitaire
Métro, boulot, bistro, mégots, dodo, zéro »

Je ne peux simplement pas croire que nous ne sommes que cela.

Ce que j’ai quand même appris : j’avais trop préparé, toutes les étapes étaient sur mon GPS (le tracé, les auberges, les cybers café, les pharmacies), je n’ai pas eu à m’en servir, mes billets de car Burgos/ Hendaye, mon billet de train retour, tout était trop planifié, l’esprit du chemin c’est finalement de retrouver la liberté, de lâcher prise, je l’ai compris sur ces dix jours, mais le plus important ne se trouve pas en seulement dix jours mais sur une période plus longue on devrait alors retrouver la solidarité, le dépassement de soi, la sérénité, la joie…

Je vais bientôt recommencer, mais cette fois en France, le Puy en Velay/ Conques, je vais essayer de marcher moins vite, de ne plus me soucier des dénivelés  et  lâcher prise, d’élargir mon espace. Je ne manquerais pas de vous donner des nouvelles.

Finalement ces dix jours étaient un prélude à d ‘autres randonnées.

Cherchez et vous trouverez.

Ultreïa. (toujours plus loin)        

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